On aura toujours les geperuts
Des émotions à fleur de peau et des souvenirs inoubliables : les expériences de deux expats Geperuts de retour à Paris pour les deux diades : celle du Baptême des Castellers de Paris et le Deuxième Festival International de Castells
par Natàlia Albaigès i Ràfols et Sergi Esteve i Garcia
Traduction d’Ariadna Gelabert
Sous nos pieds un sol irrégulier, des métros qui volent, des terrasses pleines de minuscules tables, une langue déchiffrable mais qui n’est pas la nôtre, du gris plus que du bleu… Le regard que nous échangeons veut tout dire : on est arrivés ! Nous revivons le passé à travers le présent le plus immédiat, un environnement familier mais pas tout à fait : nous sommes à nouveau à Paris. Nous – Natalia et Sergi – croyons et vivons le slogan de la colla « Geperut un jour Geperut toujours ».
Quelques mois plus tôt nous sommes retournés à Barcelone, Natalia un peu avant Sergi, mais tous les deux partagent la même chance : celle d’être devenus captifs de Paris et addicts à ce groupe de personnes qui partagent le même rêve de toucher le ciel. C’est ainsi que se comporte cet aimant incroyable qu’est Paris. Mais attention, la promesse de devenir colla de six et la pression incessante – pour ne pas dire suffocante – de nos amis ne nous laissait pas d’autre alternative. Nous devions y être et nous devions le vivre.
Le dernier weekend d’avril nous nous étions donné rendez-vous à Paris pour fêter la Journée de Baptême avec nos parrains, les Castellers de Lleida et les Castellers de Poble-Sec. Comme à Barcelone nous avions commencé à nous entraîner avec ces derniers (et sur ce point Natalia bien plus longtemps que Sergi) ce weekend nous rendait encore plus heureux.
En prenant l’avion nous nous demandions comment nous allions trouver la colla et dans quel état d’âme tout le monde serait pour affronter de nouveau les colossaux castells de six. Nous nous souvenions clairement les difficultés que nous avions éprouvées à la dernière diada en Andorre (octobre 2016). Un weekend qui avait été très intense et sans aucun doute inoubliable : le train de nuit, les retrouvailles avec les expats Geperuts, le 2X1 magique à Caldea, les jeux de la soirée au ton élevé, le pilar dans la montagne… Mais aussi nos premières chutes, la réaction de la colla pour réessayer, une Lucia à fond pour monter à nouveau et une ambiance de fraternité qui a tout rendu très spécial. En plus, nous avions la certitude que comme d’habitude les équipes techniques et administratives avaient énormément travaillé pour que ce weekend soit un succès, et il le fut !
Samedi nous nous réunissions donc à la Vilette et en chemin les nerfs commençaient à monter. Des nerfs mêlés à l’émotion incontrôlable de vêtir de nouveau la meilleure chemise du monde et de retrouver cette grande famille qui nous manquait tant. A peine arrivés sur place nous nous sommes rendus compte que, comme dans la vie, rien ne dure éternellement. De nouvelles têtes et de nouvelles dynamiques remplissaient la colla, mais l’ambiance et l’esprit étaient toujours les mêmes : nous nous sentions comme à la maison. Et attention… dans un battement de cils nous chargions et déchargions trois castells de six avec une facilité déconcertante, quel scandale ! L’explosion de joie et les embrassades pleines de transpiration et d’extase emplissaient la Villette. La colla était très forte et en redemandait toujours plus… Des castells travaillés, une canalla entraînée, des poms plus légers, des troncs fermes et une pinya d’acier plus compacte que jamais avec l’aide de nos parrains, nous avions tout. La Tour Eiffel nous attendait impatiente et tremblant.
Et c’est sous un ciel menaçant et comme sur un fond de carte postale que les Castellers de Paris sommes rentrés dans l’histoire : des castells de six imparables et un pilar de cinq soulevé par-dessous qui ont repoussé toute inquiétude de pluie et ont laissé les spectateurs totalement absorbés. Cependant le meilleur de tout a été l’effort, la motivation, la joie et l’envie de nos parrains de nous accompagner le jour de notre baptême ; sans aucun doute avec les félicitations du jury.
S’il y a une chose que nous avons clairement sentie durant ce weekend c’est que nous devions impérativement revenir à Paris pour la le Deuxième Festival International de Castells. Tout était allé très vite, avec une rapidité extrême, sans prévenir… Le pilar de cinq soulevé était chargé, et emportés par l’euphorie effrénée nous achetions déjà les billets ! Ce monde des castells est une folie, ça ne faisait même pas deux mois et nous étions à nouveau là.
Le rendez-vous international était également à la Villette – emplacement qui se voit attribuer une signification pour les castellers – et réunissait les colles de Londres, Copenhague et Andorre. Le plus émouvant de cette diada furent les retrouvailles et amitiés que nous avons eu entre les colles : avec Londres parce que le Premier Festival International de Castells était là-bas et a laissé une empreinte inoubliable ; avec Andorre pour leur invitation dans leur pays et l’hospitalité dont ils avaient fait preuve ; et avec Copenhague parce que chaque fois que nous nous retrouvons une alchimie particulière a lieu, peut-être parce qu’ils sont le miroir de ce que nous avons été. Les aider a été un plaisir et une fierté.
Même si nous ne sommes pas parvenus à obtenir la même perfection que pour notre baptême, les castells de six solides et stables que nous avons présenté établirent une chose encore plus importante : la consolidation et la stabilité de la colla des Castellers de Paris. Si on regarde en arrière, notre histoire pleine de vertige, de passion, d’amour, de famille et de travail d’équipe. C’est aussi pour tout ça que vous nous manquez tant et qu’aucune autre colla de la Catalogne ne se rapproche de ce que symbolisent les Geperuts.
Enfin avec ce point de l’article – qui s’achève – nous vous demandons de prendre soin de vous, d’aimer la colla, de rester unis malgré les différences, que vous profitiez de faire des castells ensemble… et par-dessus tout, de manière très égoïste nous vous demandons de continuer à apporter aux Geperuts l’oxygène dont ils ont besoin pour que nous puissions, à chaque occasion, rentrer chez nous.
Natàlia et Sergi.
P.S. Oubliez tout ce que nous venons de vous vous dire et ce ton pseudo-émotif, passionné et mélancolique. Le meilleur de ces deux weekends ont été les guerres entre Natàlia et Sergi pour dormir dans les bras de Bailo, voir en action le tireur Miquel Huguet se vantant devant les colles invitées ; voir la junta stressée quand tout était parfait, déranger les membres de l’équipe technique en les interrompant ou en bavardant dans la pinya, vivre en direct live le visage rouge de Jordi dans les pilars, entendre à nouveau le son de la gralla d’Edgar, revoir le corps roux re Marc tout juste sorti de la douche.. ; en gros vous supporter à nouveau avec l’excuse d’élaborer des constructions éphémères. Qu’on est bizarres les castellers, non ?